Camping dans la neige à Beni Mellal et cascades d’Ouzoud

Après toutes ses péripéties, et plus de 10 heures de trajet, je suis bien contente de rencontrer Zakaria, l’ami d’Ahmed, c’est le quatrième bus de la journée et je suis ravie de pouvoir enfin discuter. J’en apprends un peu plus sur l’évènement où je me rends ce weekend. Il s’agit d’une rencontre de voyageurs qui a lieu une fois par an, le lieu change chaque année et des jeunes de tout le Maroc se rejoignent pour camper et faire des activités ensemble. Un beau moment d’échange ! Zakaria est l’un des organisateurs, il est aussi sur Couchsurfing et adore voyager dans les différentes régions de son pays.

En route pour le campement

Nous arrivons à 4h du matin à Beni Mellal, une ville dans les montagnes de l’Atlas, est-il encore utile de préciser qu’il fait très froid ? Après tout, depuis que j’ai quitté le sud, j’ai froid tout le temps… A mon grand bonheur, alors que je pensais dormir sur un banc dans la gare jusqu’au petit matin, Zakaria appelle un ami qui nous accueille en pleine nuit ! Waouh génial ! J’ai donc un matelas et un sac de couchage chez cet inconnu. En fait, il s’agit d’un autre organisateur de l’évènement.

Le matin, nous prenons le petit déjeuner près de la gare et je commence à voir affluer de toute part des backpackers ! Des dizaines de personnes arrivent, sac sur le dos avec sac de couchage et tentes, je retrouve Ahmed qui m’a invitée à cet évènement, je commençais à me sentir un peu seule et perdue. Ils se connaissent tous et sont ravis de se retrouver, je me demande un peu ce que je fais là. Certains parlent un peu français, d’autres un peu anglais, mais bien évidemment, ils parlent tous ensemble en darija et, je n’arrive pas à suivre.

Nous prenons ensuite plusieurs taxis partagés qui nous emmènent d’un point A à un point B puis à un point C et D. Nous faisons quelques emplettes, nous partons camper dans la nature et par conséquent, nous serons en totale autonomie. Des œufs, du pain, des légumes, de l’eau, du thé, des fruits… Un peu de tout et l’on continue de sillonner la ville. On me remet un bracelet de l’évènement, super ça se précise. En fait, j’apprends plus tard que cette chasse aux trésors jusqu’au lieu de l’évènement est un moyen de contrôler le nombre de participants et les « intrus ». Tout est gratuit mais afin d’éviter les débordements, ils souhaitent garder le lieu secret et le nombre de personnes présentes à 300 (!) ce qui me semble déjà énorme.

De la … neige au Maroc ?!

Nous arrivons enfin au lieu d’embarquement, de gros pick-up nous attendent et nous embarquons à 12 à l’arrière, tous les sacs entassés sous nos pieds, nous sommes debout, prêts à découvrir le campement. J’entends quelqu’un me dire qu’il y a de la neige à l’endroit où l’on se rend, je rigole, haha, la bonne blague. Plus nous avançons sur les 30 km de chemin de montagne soit plus d’une heure de trajet, installés en extérieur, les cheveux au vent…, plus les paysages changent et plus il fait froid. Ce n’est pas du tout une blague, après un virage, tout est blanc ! Mon dieu… où va-t-on ?!


Mes copains d’aventures n’ont pour la plupart jamais vu de neige et sont donc ravis ! Moi, je commence à paniquer, nous allons dormir dans des tentes dans la neige ?! Nous n’avons pas du tout l’équipement nécessaire. Je fais part de mes inquiétudes à Ahmed qui est bien trop content qu’il neige pour comprendre la raison de ma panique. Alors que nous nous embourbons de plus en plus avec le pick-up, le chauffeur finit par nous poser en pleine nature, l’endroit est incroyablement beau, j’oublie presque les conditions horribles qui nous attendent. Il reste 1 km à faire à pied jusqu’au campement. La route est trempée, nous nous enfonçons, les pieds trempés. Il fait hyper froid.

Au campement, une trentaine de tentes sont déjà là, ils nous expliquent qu’il a neigé cette nuit, tout était vert la veille ! Nous voilà donc avec une pelle, en train de préparer l’emplacement où planter la tente, le tout sous les flocons de neige qui tombent. Puis, nous partons chercher du bois pour le feu, toujours sous la neige, direction la forêt. Je ramène des branches, qu’est-ce que je fais ici ? En plus, il n’y a aucun moyen de partir, nous sommes au milieu de nulle part. En face du campement, il y a une grange où vit une famille, j’ai l’impression qu’ils viennent d’un autre siècle avec leurs chèvres, tellement isolés de la société, c’est dingue de vivre ici sans aucun moyen de locomotion pour redescendre à la ville.

C’est le début de 3 journées dans le froid.

Le premier jour passe assez rapidement, petite balade dans les environs, je découvre des paysages splendides. Les repas sont très conviviaux, chacun met sa gamelle sur l’énorme feu de camp au milieu du cercle formé par les tentes. Des théières chauffent en permanence sur les braises, ici, pas d’alcool, que du thé à la menthe ! Et ça réchauffe !

La nuit tombe rapidement, les chaussettes et chaussures sont en train de sécher tout autour du feu, je porte 6 tee shirts et 3 pantalons, 2 paires de chaussettes, une polaire et un Kway, c’est un truc de dingue.

Après le diner, tout le monde se regroupe autour du feu, notre seule source de lumière et de chaleur, je ne comprends pas un mot des conversations qui ont lieu autour de moi. Je ressens les ondes positives, je me sens bien mais un peu seule, je me demande un peu ce que je fous là. Les marocains chantent des chansons et jouent de la musique, c’est super sympa. Je profite de l’instant présent et j’essaye de ne pas penser à la nuit en tente qui m’attend.

Je tombe de fatigue, la nuit en bus la veille a été courte, vers 2 heures du matin, je vais donc me coucher. Quel froid ! Inimaginable ! Les sacs de couchage marocains ne sont clairement pas fait pour les températures négatives, très fins, ils n’isolent pas du tout du froid. Je rajoute mon paréo et ma serviette de toilettes en microfibre sur moi, ça ne suffit pas. Je finis par m’endormir, j’ai peur de perdre mes orteils (quoi ? j’exagère moi ? noooon…).

Au réveil, l’eau de nos bouteilles est gelée, la rivière qui passe à côté du camp également. J’aperçois le soleil sur l’autre flanc de la montagne et m’y rend. Assise au soleil, je me réchauffe doucement. Je suis au milieu des chèvres, c’est super agréable. Les premiers rayons me réchauffent, je finis même par ouvrir ma polaire, sauvée ! Je bouquine sur mon rocher dans le calme absolu qui m’entoure, c’est le rêve.

L’après-midi, on me propose de participer à une randonnée pour aller voir une cascade, super c’est tout ce que j’aime ! Et j’ai espoir d’avoir moins froid si je marche. Nous partons avec un petit groupe d’une dizaine de personnes et 2 guides, nous descendons dans la vallée, la neige s’amenuise autour de nous, quelques degrés supplémentaires, j’enlève la polaire, yeeees ! La descente semble interminable et les paysages sont dingues, vraiment magnifiques.

A un moment donné, le chemin (qui n’en est pas un) est vraiment escarpé, nous sommes au bord de la falaise, le trou à côté de nous est saisissant. Nous faisons une chaine humaine pour nous soutenir, un énorme rocher craque sous nos pieds et tombe pendant de longues secondes avant de s’écraser une centaine de mètres plus bas. Outch, ça fait peur.

Heureusement qu’il y a deux professionnels avec nous. Mon sang s’est glacé quelques secondes mais pas le temps de réfléchir, il faut continuer à avancer. Un vrai esprit d’équipe se crée et tout le monde se soutient. Nous arrivons enfin à l’endroit supposé de la cascade qui est … sèche ! Il n’y a pas une goutte d’eau ! Dommage… Et forcément, si nous descendons beaucoup, vous vous en douterez, il faut remonter ensuite ! Les guides nous font couper en travers, nous devons donc grimper à la verticale, c’est super physique. A l’aide de mes mains, j’attrape des racines et tente de me hisser comme je peux. Nous mangeons quelques fruits sur les arbres, c’est sucré, ça fait du bien.

Nous devions partir pour une heure ou deux mais cela fait déjà bien plus de 2 heures que nous sommes partis. Je n’avais pas pris d’eau et pas beaucoup mangé ce matin, ce n’est pas idéal, l’organisation à la marocaine, je devrais avoir l’habitude maintenant ! Plus nous remontons, plus le chemin devient glissant et mouillé, nous retrouvons la neige, les paysages sont toujours sublimes et après plusieurs heures, nous sommes de retour au camp.

Le petit carré c’est le camp ! On y est presque !

Des activités ont eu lieu en notre absence, les garçons sont tous déguisés en indiens, des parcours à base de course en sac, de vitesse, précision sont encore visibles sur le campement. Puis, ils font une bataille de couleur comme le festival Holi en Inde, la neige se teinte de toutes les couleurs.

Après cette longue marche, il est grand temps de manger ! Je prépare des pâtes et une salade, nous nous régalons ! Le soleil est de retour, enfin.

J’aperçois une fille blonde sortir d’une tente, coup de bol, Ahmed connait la personne avec qui elle est venue et nous présente. Elle est allemande et voyage en stop et tente au Maroc depuis plusieurs mois. Nous sommes les seules étrangères dans cette montagne et forcément, contentes de pouvoir échanger un petit peu. Elles parlent plutôt bien le darija et comprend donc mieux que moi ce qu’il se passe et se dit. Alors que nous discutons depuis quelques minutes, elle sort un panier de sa tente et à l’intérieur … elle a un chat enroulé dans une couverture !! Elle voyage avec un chat ! Je suis trop fan ! Elle l’a trouvé quand il était bébé et depuis, il ne la quitte plus. Il est libre et considère la tente comme sa maison. Il est super sociable et c’est marrant de le voir découvrir la neige.

Ce soir, je suis cassée après la marche et le froid me tétanise, je suis malade, je me demande si j’ai de la fièvre. Ça fait 36 heures que nous sommes là et je rêve d’une douche bien chaude et d’une énoooorme couverture. Je lis dans la tente à la lumière de la lampe torche, j’entends la musique au loin mais je ne suis pas d’humeur à me joindre au groupe. Je dors étonnamment longtemps au vu des conditions et me réveille plus positive, je sais que l’on retourne à la civilisation aujourd’hui, nous redescendons de notre montagne ! Yes !

Finie la neige : retour en terrain connu !

Nous devons à nouveau marcher 1 km sur le chemin plein de gadoue pour retourner à l’endroit où les pick up viennent nous chercher. Cette fois, j’ai la chance de pouvoir m’assoir devant à côté du chauffeur, je ne me fais pas prier. Je pense que c’est comme ça que j’ai attrapé froid il y a 2 jours, en étant debout à l’arrière de la jeep. Je suis assise à côté d’une jeune fille que j’ai entendu chanter la veille, nous discutons et j’apprends qu’elle est en train de relever le défi de grimper les 5 sommets les plus hauts du Maroc avec une jambe appareillée.

De retour à Beni Mellal, j’annonce à Ahmed que nos chemins se séparent de nouveau car je souhaite visiter les cascades d’Ouzoud qui ne sont pas très loin d’ici. A ma grande surprise, il choisit de m’accompagner et de retarder son retour à Agadir d’une journée. Nous prenons des taxis partagés pour Azilal puis le village d’Ouzoud où nous allons passer la nuit.

Les cascades d’Ouzoud

Arrivés au coucher du soleil, nous traversons tout le village d’Ouzoud, passons au-dessus de la rivière, apercevons la cascade sur notre droite, elle est magnifique ! J’ai hâte de la voir en plein jour. J’ai repéré sur internet des « campings » où il est possible de dormir au bord de l’eau dans des bungalows, ça nous tente bien.

Seul problème, je n’ai pas franchement réfléchi que cela signifiait (encore) des conditions précaires. Arrivés à destination, il n’y a pas d’eau chaude, nous sommes seuls au monde dans la forêt. Ahmed négocie le prix du bungalow et je choisis celui avec la meilleure vue, nous sommes les seuls clients. Le propriétaire nous explique comment préparer le meilleur thé en rinçant les feuilles de thé puis en mélangeant différentes aux infusées, puis il accepte en échange de 50 dh de nous laisser préparer notre repas dans la cuisine et de nous servir des ingrédients que l’on souhaite.

Mais d’abord, je rêve d’une douche. Le gentil propriétaire fait bouillir 2 énormes casseroles d’eau chaude et me montre la « douche » : une mini pièce carrée, basse de plafond avec un trou dans le sol. Je remarque vite les petites araignées qui habitent les lieux et leur explique avec grand respect que je ne leur ferai aucun mal mais qu’en échange, je leur demande de ne pas venir dans mes affaires. L’eau bouillante est la meilleure chose au monde après : 1 journée + 1 nuit dans un bus, 3 jours et 2 nuits de camping dans la neige. Je revis ! Nous préparons un tajine et mangeons à la lumière d’une mini ampoule et au son de la cascade.

Au réveil, la cascade est resplendissante, j’attrape mon bouquin et m’installe en terrasse au soleil pour profiter de cet instant de tranquillité.

Les touristes arrivent rapidement dans notre havre de paix et nous repartons. De notre bungalow jusqu’au village ce ne sont pas moins de 600 marches que nous devons remonter, aie aie aie les cuisses !!

Le suuuud >> retour à Agadir

Nous avons une longue journée de route jusqu’à Agadir ! Eh oui, j’en ai marre du froid et ai donc décidé de redescendre dans mon petit coin de paradis au bord de l’océan. Ainsi, je peux repasser à Imsouane voir mon bébé chat et mes collègues, surfer et refaire un peu de yoga, passer du temps avec Ahmed et ses proches avant de quitter le Maroc pour de bon.

Pour ne pas faire simple, nous avons décidé de faire le trajet Ouzoud – Agadir en stop ! Il nous faudra 10 heures et 8 chauffeurs pour arriver à destination. L’un des chauffeurs en plein cœur de la ville de Marrakech est un néerlandais qui vit dans son van, il a un attrape rêve et une déco très hippie dans son véhicule. Il nous parle du Maroc comme s’il y vivait depuis des années et pourtant, il est arrivé il y a tout juste une semaine ! Il explique qu’il a rencontré ses frères et sœurs dans le désert et qu’il est dieu… Une rencontre surprenante !

Les autres conducteurs sont plutôt normaux en comparaison et enfin, notre dernier moyen de locomotion est un camion rempli d’oranges. Un vieux camion j’entends. Nous roulons à 25 km/h sur l’autoroute et je désespère d’arriver un jour. Il fait froid (à nouveau) et nuit, j’ai vraiment hâte d’arriver. Les chauffeurs sont adorables bien sûr et nous passons un très agréable trajet en leur compagnie, juste que nous mettons 3 fois plus de temps qu’il n’en faut pour rejoindre Agadir depuis Marrakech.

Coucher de soleil vue du camion

Ce camion nous dépose au milieu de nulle part, car les chauffeurs ont atteint leur endroit pour la nuit. Il fait totalement noir, une lampe assez puissante éclaire au milieu de la route dans notre direction : la police ! Ahmed leur explique ce que l’on fait là. Ni une ni deux, le policier arrête le camion suivant qui passait par là et nous fait monter dedans, le chauffeur n’a pas eu le choix. Fermé au début, il finit par se détendre. Ouf, sauvés !

C’est parti pour quelques jours à Agadir, loin de la neige et puis le retour à Imsouane avant de continuer mes aventures !