Qui aurait cru que j’écrirai mon bilan de l’année 2020 depuis le Portugal … Sûrement pas moi !
L’hiver dernier, après mes 5 mois au Maroc, je suis rentrée en France pour les fêtes de fin d’année. J’ai passé du temps en famille et fais mes au revoir pour une longue durée. Je partais en Inde, début janvier, avec un visa d’un an, peu d’idée sur le programme des mois à venir mais la certitude que je ne reverrais pas l’Europe avant au moins 2021, sinon plus. J’étais sereine à cette idée, enfin, c’est ce que je croyais.
Le voyage en Inde, c’était l’idée de ma Maman, son rêve depuis si longtemps. Et c’était aussi l’occasion pour moi d’approfondir mes connaissances en yoga avec une formation à Rishikesh qui me permettrait d’obtenir un certificat de professeure de yoga, une retraite de méditation (Vipassana) que je souhaitais faire depuis si longtemps, un retour en Asie, terre de mes premiers voyages, mon amour de la nourriture asiatique/indienne, un dépaysement culturel, la chance de retourner au Vietnam pour rendre visite à la Maison des affections, l’occasion d’aller en Indonésie et de surfer, de faire des treks au Népal …
Bref, j’avais plein d’idées, rien de bien précis, mais en retournant en Asie je savais que j’allais retrouver un univers de voyage que je maitrise, que je connais et que j’aime plus que tout. Comme un retour chez moi.
Janvier 2020 : Tout a commencé avec 1 mois de voyage au Rajasthan avec Maman, juste incroyable !
Que de belles rencontres, de découvertes, de sourires, de beaux paysages, de beaux temples, d’Aventures ! Et ces moments de complicité mère-fille si beaux, si importants. Merci infiniment Maman de m’avoir fait confiance pour ce voyage ensemble, de me suivre dans mes aventures les plus folles, de te dépasser et de n’avoir peur de rien. Tu m’as surprise, dans le bon sens du terme, dépassant chaque jour de nouvelles barrières : culinaires, tu as tout gouté, mêmes les choses les plus bizarres ou épicées; de confort, allant jusqu’à dormir dans le lit d’un papi, dans les trains couchette ou en utilisant des toilettes absolument dégueu’ (y a pas d’autres mots haha) ; de risque, en suivant le premier venu qui nous propose un taxi jusqu’à notre hôtel à 2h du matin ou en montant sur le scooter d’un inconnu, à 3 sous la pluie et sans casque, … Je ne te l’ai peut être jamais dit mais je t’admire beaucoup ! Tu as cette capacité d’adaptation, ce sourire et cette bienveillance que j’essaye de copier depuis toujours. Nous visitons 20 villes en 33 jours, parcourons plus de 3500 km en bus et train. Sacré périple !
Février 2020 : Départ de Maman, retraite Vipassana et arrivée de Manon.
Maman s’en va, je passe une semaine à Pushkar, un petit « home away from home » un village sacré aux énergies bien particulières. Ici, je prends le temps d’écrire, je mange plein de bonnes choses, je me repose après ce mois de voyage passionnant mais épuisant; et surtout, je m’apprête à passer 10 jours de retraite dans le silence. Fidèle à moi-même, je pars avec l’objectif de trouver des réponses à toutes mes questions existentielles. J’ai un but précis, un objectif : trouver un sens à ma vie. Spoiler alert : c’est la pire chose à faire !! La méditation c’est du lâcher prise, pas d’attente… Bref, l’inverse de l’état d’esprit dans lequel je partais. Je crois que personne n’est préparé à ce qu’il va vivre durant une retraite Vipassana de 10 jours, per-sonne ! J’en ressors changée, bouleversée, j’ai l’impression de voir clair, de comprendre qui je suis et en même temps, je suis encore plus perdue qu’avant. Je pense faire un article sur mon expérience pour rentrer plus en détail dans les coulisses de ces 10 jours… Mais c’est clairement un tournant important de mon année (de ma vie ?).
Mon amie Manon me rejoint, nous n’avons pas vraiment de plan, nous souhaitons voyager un peu, à moindre coût, faire du yoga dans un ashram, nous rendre au Népal puis dans le sud de l’Inde. Nous décidons de vivre au jour le jour.
Mars 2020 : Volontariat à Jaipur, visite du Nord de l’Inde en couchsurfing et … l’arrivée du Covid !
Nous passons 2 semaines à Jaipur où nous sommes volontaires dans une agence de tourisme, l’occasion de tester tous les tours (dont un safari pour voir des tigres !!) et d’apprendre des dizaines de recettes de cuisine toutes plus excellentes les unes que les autres. Nous fêtons Holi en petit comité car c’est le début de la folie Covid… Mais il n’y a que très peu de cas en Inde, nous continuons donc notre voyage. La situation se complique en France, mais ici, la vie poursuit son cours. Nous allons à Chandigarh, à Amritsar où nous découvrons le temple d’Or, un lieu incroyable qui nous touche. Nous passons quelques jours en Couchsurfing dans une famille du côté de Shimla dans les montagnes et c’est un moment magique, hors du temps. La France rentre en confinement, nous comprenons rapidement que la situation va se compliquer pour nous aussi et nous décidons de nous rendre dans une ferme en tant que volontaire pour nous préparer à un éventuel confinement.
Avril 2020 : Confinées dans l’Himalaya !
La situation empire chaque jour, l’Inde est confinée … Nous avons bien fait de venir à la ferme, dormir dans une hutte, vivre sans électricité, ni eau courante, couper du curcuma, faire 2h de yoga chaque jour, nous sommes dans une bulle loin des tourments qui agitent le monde. Nous vivons une expérience totalement inédite, nous apprécions tous les bons côtés. Mais après quelques semaines, nous n’arrivons plus à nous projeter dans notre voyage, toutes les frontières sont fermées, le monde est en pause et sans perspective d’avenir, la vie à la ferme est très routinière et j’ai l’impression de revivre ma retraite de méditation : il n’y a aucune distraction, couper le curcuma ressemble à une forme de méditation 5h par jour et après 2 mois ensemble, nos discussions s’épuisent, je me pose énormément de questions, je ne me sens pas très bien… Après 1 mois de cette vie « retour aux sources » nous prenons la décision avec Manon de rentrer en France.
Je rentre chez mes parents à Cahors après seulement 4 mois de voyage et aucune idée de ce qui m’attend ou de la prochaine fois où je pourrai repartir. Contrairement à ce que j’imaginais, je ressens un immense soulagement d’être en France. Je sens que c’est là où je dois être et je me sens étonnamment bien. C’est la première fois depuis 4 ans que je suis en France sans date de départ pour une nouvelle aventure, sans aucun projet, aucune idée de ce que je vais faire des mois à venir. Je crois que c’est ça 2020 non ?
Mai 2020 : Confinement à Cahors chez mes parents
Je passe plus de temps avec mes parents que je n’en ai passé depuis des années, je (re)découvre la vie sédentaire à 3 sous le même toit, les repas en famille, les jeux de société, les soirées films, les balades, le jardinage … Nous avons de la chance il fait beau, je profite de l’extérieur. Je vis 100% dans l’instant présent, je mets enfin en pratique tout ce que j’essaye d’appliquer depuis des années mais que mon mode de vie ne m’autorisait pas. J’arrête de me poser des questions, de réfléchir. J’ai l’immense chance de pouvoir rester chez mes parents pour une durée indéterminée en cette période compliquée. Je me repose, je cuisine de bonnes recettes indiennes, je fais du yoga, des activités manuelles …
Juin 2020 : Visite aux amis et la famille en Bourgogne
Déconfinement rime avec visite et repas de famille, moi qui avais dit au revoir pour plusieurs années, me revoilà déjà ! Je suis contente de ces retrouvailles. Je commence à me poser la question de ce que je vais faire « ensuite ». Un peu perdue à cause des limitations liées au Covid, des frontières fermées et des mesures sanitaires … Je passe 2 semaines à La Rochelle, dans cette ville où je me sens chez moi. Je retrouve des amis, je fais la fête pour la première fois depuis longtemps, un cours de surf, le soleil, du vélo, la vie est belle.
Juillet 2020 : Tour de France
Je profite d’être « coincée » en France pour revoir mes amis et reprendre contact avec des personnes perdues de vue depuis longtemps. Je visite l’Auvergne, la Normandie, les Landes, je passe par Paris … Je fais aussi plein d’escapades dans le Lot, je découvre avec mes yeux de voyageuse les lieux où je suis passée 100 fois sans prêter attention. C’est vraiment une belle région !
Mais j’ai besoin d’une aventure qui me sorte de ma zone de confort, où je me reconnecte à la nature, où je reste en France car les conditions sont toujours incertaines, où mon empreinte carbone est nulle car je suis fatiguée de voir la planète être détruite par nos comportements. Ca y est, j’ai un plan… Je vais partir sur le chemin de Compostelle, à pied avec mon sac à dos et tout le nécessaire pour bivouaquer dans la nature.
Aout 2020 : Préparation et départ sur le chemin
Derniers achats du matériel (hamac, chaussures, réchaud, …) et c’est parti pour un long chemin. Aucune idée d’où je vais, combien de temps, je ne suis pas sûre d’être capable de marcher autant, d’en avoir l’envie ou l’énergie. Malgré les difficultés physiques et les (fausses) limitations mentales, chaque jour qui passe, mon mental m’incite à continuer. Je fais de belles rencontres, je m’émerveille de chaque paysages, de chaque lever et coucher de soleil, j’apprécie dormir dans la nature, je vis uniquement dehors. La première fois que je retourne dans un supermarché, je ne supporte pas les lumières artificielles ni la musique. Quel changement ! Je me sens super bien.
Septembre 2020 : Poursuite du chemin en France
Je passe 2 semaines avec Pam, une autre pèlerine qui marche seule avec sa tente. Nous bivouaquons dans des lieux improbables avec une préférence pour les cimetières (robinet d’eau accessible pour se doucher) et nous mourrons de chaud dans le Gers… Maman vient marcher avec nous quelques jours. Puis, mes deux parents viennent faire les derniers 100km français avant les Pyrénées. Ils ont l’espoir de me ramener à la maison ensuite. Mais mon aventure est loin d’arriver à son terme. Avec un groupe de pèlerins rencontrés au fil des kilomètres, nous décidons que rien ne nous arrêtera et nous continuerons vers l’Espagne.
Fin Septembre, je traverse les Pyrénées, quelle joie, bonheur et fierté ! J’ai déjà parcouru 800 km et je réalise seulement maintenant que je suis capable d’aller jusqu’au bout.
Octobre 2020 : En marche sur le Camino Frances (en Espagne)
Beaucoup de pluie en Espagne, moi qui détestais la pluie, j’apprends à vivre avec et même à l’apprécier. De toute façon rien ne peut m’arrêter, je fais aussi plein de nouvelles rencontres, j’approfondis les amitiés du chemin français, je mange beaucoup de tortillas, je suis moins fatiguée, mon corps a pris le rythme des 25 km chaque jour. Une pause pour récupérer à Burgos qui fait beaucoup de bien et je repars plus motivée que jamais. Je fais des journées de 40 km ! Je traverse la meseta, cette zone désertique de 250km au centre de l’Espagne. Je suis face à moi-même et face à mes émotions. Je pleure, je ris, je chante, je danse, je cours dans les descentes, j’en ai marre, mais j’avance. Toujours. Et enfin, le 21 Octobre, j’arrive à Santiago. C’est une avalanche d’émotions, je pleure comme je n’ai jamais pleuré de toute ma vie. Je suis tellement fière de moi et épuisée. Je m’arrête 3 jours et l’appel du chemin est plus fort. Je repars jusqu’à Fisterra puis Muxia, j’ai retrouvé l’océan, le bruit des vagues. Cette fois, je m’arrête pour de bon. Je prends le temps de me reposer avec mes amis dans un appartement.
Novembre 2020 : Décision prise, je pars au Portugal.
La France est reconfinée, l’Espagne prend la même direction, le Portugal a l’air d’avoir des mesures plus souples. C’est parti ! Premier arrêt à Porto, je dors en Couchsurfing, j’ai de supers hôtes ! Il fait beau, je visite la ville, je fais plein de jolies rencontres, j’ai des conversations passionnantes. Je sens que je suis au bon endroit au bon moment. Je continue d’avancer dans mon chemin intérieur. Je poursuis mon périple en stop, en Couchsurfing, je suis relancée dans mon mode de voyage préféré. Tout s’enchaine à merveille. Je trouve un volontariat à Faro et j’y passe 3 semaines. C’est compliqué mais une rencontre me fait rester et chaque jour est une occasion de se dépasser et d’apprendre toujours plus sur soi.
Décembre 2020 : Peniche, volontariat et yoga
Je commence ma formation de prof de yoga en ligne, il vaut mieux tard que jamais, c’était un de mes objectifs de 2020 ! C’est aussi le moment où je commence un nouveau travail à Peniche, dans une très jolie auberge, village de surf, au bord de l’océan. Tous les éléments si importants à mon bien être sont réunis pour que je m’épanouisse ici. Je mets du temps à m’intégrer, je ne suis pas dans le mood. Je fais beaucoup de sport (un des nombreux bénéfices du chemin, je suis devenue sportive haha !!), j’observe l’océan, je fais du yoga, j’étudie, je rencontre plein de personnes, je cuisine,… Noel arrive, mes amis du Camino viennent me rejoindre ici, ça me fait beaucoup de bien de les voir. Je m’intègre de plus en plus avec mes collègues. Le nouvel an arrive, une fête ce soir en perspective. Et une nouvelle année qui va démarrer …
2021, I’m ready for you. Mais cette fois, j’ai compris la leçon, no plan is the plan, pas d’attente.
Je suis plus convaincue que jamais : tout arrive pour une raison. Je dois simplement restée ouverte et attentive aux signes, me laisser porter, suivre mon intuition, prendre les jours comme ils viennent et les opportunités apparaitront comme par magie.
Je vous souhaite à tous un excellent réveillon et une belle année 2021.