Emotions à chaud, la fin d’un chapitre

Je vous partage avec un peu de retard ce petit texte que j’ai écrit en arrivant en Espagne, sous le coup de l’émotion. J’étais triste de partir du Maroc.

2 mois après, je ressens le manque de ce beau pays et je sais que j’y ai laissé un petit bout de mon cœur comme dans la plupart des pays où j’ai vécu. Mon mode de vie m’amène à dire au revoir à des personnes, à des endroits, souvent, et contrairement à ce que l’on pourrait penser, ça ne devient pas plus facile avec le temps.


” Alors que je redoutais ce moment depuis plus d’un mois, il est enfin temps de quitter le Maroc. Je suis venue ici avec l’idée de rester environ 2 mois, 1 mois de volontariat et 1 mois de voyage, plus ou moins.


La réalité a été toute autre ! 1 semaine de voyage, 2 gros mois de volontariat/travail suivi d’un mois de voyage puis à nouveau une semaine de volontariat et 1 semaine de voyage. Bilan, 4 mois au Maroc ! Une extension de visa à Ceuta et 1 mois à repousser chaque jour la date fatidique…

Je n’ai pas pris conscience tout de suite que je quittais le Maroc, j’ai acheté mon billet pour le ferry hier (après que mon achat en ligne la veille n’ait pas fonctionné et m’offrait donc à nouveau un jour de plus). Je me suis réveillée ce matin plutôt sereine, j’ai pris le taxi pour la gare maritime de Tanger Med, j’ai passé la douane et obtenu mon tampon de sortie sans ciller aux questions inquisitrices de la douane « vous résidez au Maroc ? Vous êtes sortie et re-rentrée à Sebta le même jour ? 4 mois de voyage vraiment ? » et je leur ai même répondu très sereinement que je rentrais maintenant en France, sans prendre conscience des mots. Sur le bateau, j’étais en train d’écrire le récit de mes derniers jours, la magie marocaine opérait toujours.

C’est en descendant du bateau, en passant la douane espagnole et ce douanier qui n’a pas répondu ni à mon « holà » ni à mon « gracias » que j’ai compris que j’étais rentrée. C’est le silence du parking devant la gare maritime d’Algeciras, l’organisation des routes, tellement fermé que je n’arrivais pas à sortir, la propreté et le calme des rues de ce petit centre-ville, les guichets fermés un dimanche après 14h, les décorations de Noël « Feliz Navidad » dans les ruelles, ce sont les prix en vitrine bien plus élevés qu’au Maroc, et c’est ce monsieur assis sur un banc qui m’a dit « Merhba » (bienvenue en Darija) suivi d’un « Bienvenida » qui m’ont fait paniquer.

Les larmes me sont montées aux yeux, j’ai quitté le Maroc.

Je ne suis pas prête pour Noël, je ne suis pas prête pour l’organisation super carrée d’Europe, je ne suis pas prête pour retrouver la froideur des gens, les magasins fermés le dimanche ou entre midi et deux, les prix élevés, les panneaux d’affichage et le calme. Ce silence dans la station de bus, ce silence dans les rues, j’ai l’impression d’avoir changé de planète. Pourtant le bruit est bien présent dans ma tête, cette petite voix qui me dit « mais qu’est-ce que tu fais là ? tu étais bien au Maroc non ? Mais oui tu vas revenir, tu ne restes pas longtemps en France, et l’Inde ça va être dingue ».

Je suis maintenant assise dans le bus, car j’ai entendu dire que le stop en Espagne c’est très très compliqué, et de toute façon, je n’avais pas envie de parler avec personne. J’ai à peine ciller quand la dame m’a annoncé le prix du billet « diecinueve treinta y ocho », probablement car je n’avais pas vraiment compris, mon cerveau a besoin de s’ajuster à l’espagnol, mais zut quoi, 20 euros les 3 heures de bus, on marche sur la tête. Je n’ai même pas mangé car 5 euros le kebab me paraissait trop cher. Et maintenant je suis assise dans ce bus ultra confortable mais silencieux, à manger mes dattes, unique souvenir que j’ai souhaité acheter avant de partir, je suis devenue une vraie fana de dattes ! Pour 3 euros le kilo, j’ai un gros sac de dates sucrées et juteuses, tendres et fermes à la fois à déguster jusqu’à mon arrivée à Séville. J’ai réservé 2 nuits dans une auberge, j’ai besoin de laver mes vêtements, bien que mon backpack soit plein, je n’ai que très peu d’affaires adaptées à la mi-saison (non ce n’est pas l’hiver, impossible) et je dois donc laver tout le temps. Fini les shorts et les débardeurs, je vous remercie de me rappeler que je remonte vers le froid. Je refuse de croire que nous sommes déjà en Décembre, je ne suis pas prête.

J’ignore ce qui me fait aussi peur à l’idée de rentrer en Europe, pourquoi mon cœur a des ratés, que j’ai du mal à respirer et que mes yeux sont embués depuis 30 minutes. Après tout, je découvre le Sud de l’Espagne et je vais pour la première fois au Portugal, je suis vraiment heureuse de voyager. Je rejoins mes copines à Lisbonne et je suis vraiment heureuse de les voir. Je vais retrouver ma famille le temps des fêtes et je suis vraiment heureuse de passer du temps avec eux. Je vais préparer mon départ en Inde avec maman et je suis vraiment heureuse d’y aller.

Un beau chapitre qui se termine, comme toujours, je souhaite me rappeler de cette citation que j’aime tant : 

« ne pleure pas parce que c’est terminé, souris parce que c’est arrivé ».

Je suis arrivée au Maroc sans aucune attente, je ne savais absolument pas à quoi m’attendre, sans préjugés positifs ou négatifs. J’étais totalement ouverte aux rencontres et à me laisser porter. Finalement, mon esprit aura été beaucoup challengé, j’ai l’impression d’avoir tellement grandi au cours de ces derniers mois. J’ai eu des prises de conscience importantes sur ma personnalité, mes relations professionnelles et personnelles. J’ai compris que je ne pouvais pas tout contrôler mais que je dois me fixer des objectifs. Je dois apprendre à persister dans la difficulté même si cela peut se conclure par un échec. J’ai trop souvent tendance à faire demi-tour à la première difficulté au lieu de me battre pour arriver à mes fins, je préfère fuir que de risquer d’échouer après m’être investie. Je dois aussi apprendre à appliquer mes propres conseils, c’est bien beau d’aider les autres mais je dois aussi m’aider moi et accepter de demander de l’aide. Je dois penser à me protéger des relations toxiques et aller vers des personnes qui me tirent vers le haut. Je dois apprendre à parler de sentiments. Enfin, je ne serai jamais parfaite et ce n’est pas grave.

Beaucoup de travail pour réussir à appliquer toutes ces jolies résolutions, mais j’ai confiance en l’année 2020.

Et puis, j’ai appris des choses positives bien sûr, ma capacité d’adaptation a encore été mise à contribution pour vivre en collectivité. Mon perfectionnisme bien qu’envahissant m’a permis d’être appréciée et respectée dans mon travail. Ma curiosité m’a fait découvrir le Maroc comme une locale. J’ai su sortir de ma zone de confort pour suivre mes objectifs. J’ai toujours été honnête avec moi-même et envers les autres. J’ai su lâcher prise quelques fois, pas assez mais c’est un début ! J’ai découvert un vrai centre d’intérêt dans la pratique du yoga et envisage d’effectuer une formation pour enseigner cet art de vivre dans le futur.

Alors voilà, le Maroc c’est fini pour cette fois, je pars des souvenirs plein la tête, un carnet d’adresses bien remplis, des nouveaux amis aux quatre coins du monde, des photos plein mon téléphone et du travail pour vous partager tout cela sur mon blog ! Je suis prête pour de nouvelles aventures !